Déjà annoncée par le Gouvernement de Manuel Valls en 2015, l’idée d’une multiplication des radars sur le territoire et leur attribution, en ce qui concerne désormais également les radars embarqués, au secteur privé a germé et tend à se concrétiser sous le Gouvernement d’Edouard Philippe. Une cause pour laquelle le Député Franck MARLIN déjà fait valoir sa ferme opposition dès les premières discussions amenées devant l’Assemblée Nationale.
« Le gouvernement a investi pour l’achat et la mise en service de véhicules équipés de radars embarqués en 2013. Mais compte tenu de leur très faible utilisation, d’environ une heure par jour, la solution semble toute trouvée pour le nouveau gouvernement. Encore une fois, les conducteurs vont en subir les frais !
« Déjà, l’annonce d’une augmentation des radars et contrôles de vitesse sur les routes avait attisé la colère des usagers qui en ont assez de ce racket, alors que nombre d’automobilistes ou de motards n’ont d’autre choix que d’utiliser leur véhicule pour effectuer les trajets quotidiens jusqu’à leur lieu de travail.
« Dorénavant la démarche va plus loin, avec un déploiement sur les routes de véhicules-radars gérés par des entreprises privées qui alloueront la totalité de leur temps à la traque des conducteurs dont la vitesse ne sera pas également exacte à celle indiquée sur les panneaux de limitation, en faisant durement payer les très petits dépassements de la vitesse autorisée accompagnés de la perte d’un point sur le permis de conduire…
Vers une recherche de rendement pour assumer les objectifs de politique budgétaire du gouvernement
« On veut nous faire croire que cette manœuvre vise à l’optimisation de la sécurité routière en rationnalisant les équipements et les policiers. Mais il ne faut pas longtemps pour y voir en fait une véritable logique de rendement.
« L’externalisation des radars embarqués ne doit pas être comprise au même titre que celle des radars fixes qui, eux, bien que cela reste contestable, sont censés être installés dans des lieux accidentogènes. En sous-traitant la gestion d’une activité de sécurité publique, en principe dénuée de toute recherche de bénéfices, à une entreprise privée, cette démarche s’inscrit donc dans une recherche de profits.
« Il faut bien souligner que les radars rapportent chaque année plusieurs millions d’euros à l’Etat et représentent ainsi un flux de financement constant et inépuisable. Pour l’année 2016, c’est près de 920 millions d’euros qui ont étés récoltés grâce aux seuls radars automatiques, soit 18,5 % de plus qu’en 2015 ! Alors imaginez ce que cela sera avec des véhicules circulant en permanence !
« Ce n’est donc plus une politique de dissuasion à laquelle on devra faire face mais à un climat de suspicion généralisé avec des entreprises privées qui chercheront toujours à relever plus d’infractions, afin de pouvoir envisager une renégociation de leur contrat – en incluant des majorations – avec la puissance publique. Et ce n’est pas les assurances données par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb qui atténueront cette crainte. La rémunération au forfait qu’il défend n’est qu’une période d’essai accordée aux acteurs privés avant de pouvoir en évaluer la rentabilité sur un plus long terme… D'ailleurs, pourquoi les clauses de ces contrats restent confidentielles et ne sont même pas communiquées aux parlementaires ? J'ai demandé à les connaître... mais c'est le silence radio du côté du ministère.
« Avec plus de 2,2 milliards de recettes attendues avec ces nouveaux radars, la sécurité routière devient un prétexte pour assurer les ambitions du programme d’Emmanuel Macron, notamment en matière budgétaire...
L’amenuisement du rôle régalien de la police fait disparaître
le côté prévention de la sécurité routière
« Mais ce n’est pas seulement au coût supplémentaire qui va être supporté par les usagers pour lequel il faut crier gare ! Progressivement, on assiste à un désintéressement de l’Etat pour son pouvoir régalien de police. Ce n’est pas un redéploiement des forces de l’ordre plus ajusté aux préoccupations d’ordre public actuelles avec les exigences qu’implique l’état d’urgence et le terrorisme, mais bien une sous-traitance des missions considérées comme subsidiaires. L’aspect prévention a totalement disparu.
« Qui d’autre de mieux placées que les forces de l’ordre pour veiller à notre sécurité ? Comment faire accepter l’idée que des entreprises privées, des personnes lambda qui, par le seul effet d’un contrat de sous-traitance entre leur employeur et l’Etat, seront en mesure de mettre un citoyen en infraction ? Encore même que la prérogative de verbaliser reste confiée à la police.
« Les contrôles routiers n’entrent pas seulement dans une nécessité répressive mais aussi dans une approche préventive de la sécurité routière. Prévention qui manque aujourd’hui cruellement dans l’apprentissage de la conduite, mais également en amont pour la sensibilisation aux risques de la route de toute nature : alcool, fatigue, stupéfiants, non port de la ceinture de sécurité…
Selon la Cour des comptes : le produit des amendes ne concoure pas
à l’amélioration de la sécurité routière
« La vitesse excessive au volant est certes une cause d’insécurité routière en France, mais elle n’est nullement la seule. Force est de constater que la multiplication des limitations de vitesse ne s’est pas montrée être la solution miracle à la baisse de l’accidentologie sur les routes. Des mesures en ce sens ont même dues être revues, comme cela a été le cas dans plusieurs villes françaises.
« Brandir l’arme des radars et des contrôles routiers à tout va ne fera pas diminuer de manière fulgurante le nombre d’accidents de la route. Ce n’est qu’une vaine parade pour ne pas entamer et aborder de réforme plus structurelle visant des investissements en termes de voirie, une prévention active, ainsi qu’une sensibilisation adaptée.
« J’avais d’ailleurs proposé l’an passé un amendement visant à l’allocation des crédits annoncés pour l’achat et l’installation de nouveaux radars – pour un équivalent de 17,5 millions d’euros – pour leur réaffectation au budget des collectivités afin que celles-ci puissent effectuer les travaux de rénovation et de réhabilitation nécessaires sur nos routes. En vain…
« Il m’avait été opposé que cela remettrait gravement en cause la politique de sécurité routière. C’est une fumisterie !
« La Cour des comptes, dans son rapport publié en mai dernier, a clairement indiqué que le produit des amendes qui alimente le compte d’affectation spécial ne concoure d’aucune manière, directe ou indirecte, à l’amélioration de la sécurité routière. Tout est dit !
Les radars de virages : une idée de personnes qui ne connaissent rien à la moto !
« Malgré cela, l’embellie répressive continue. Car après les radars-embarqués confiés aux sociétés privées, on nous parle de drones, de radars à la sortie ou à l’entrée des virages pour les motards,…
« D’ailleurs, cette dernière proposition démontre malheureusement que ceux en charge de la sécurité routière ne savent pas ce que c’est que de conduire une moto. Pour faire simple, avant un virage, il faut rétrograder et décélérer, puis accélérer à l’intérieur pour l’adhérence et accélérer enfin pour redresser la moto. Sinon, c’est la sortie de route assurée. C’est juste de la physique ! Comment ces personnes peuvent ignorer cela ? Mettre un radar en sortie de virage, c’est uniquement vouloir prendre littéralement les motards au piège et, pire encore, cela mettra même leur vie en danger. C’est incompréhensible !
« Ce n’est donc pas un combat que j’ai l’intention d’abandonner. Je défendrai devant l’Assemblée Nationale une autre perspective de sécurisation routière, avec une priorité : l’entretien des routes qui est plus que jamais ignoré et une meilleure formation. »